MAMAN, NOUS AVONS RATÉ LA FUSÉE
par Roger SCHAEFFER
Chap.31
- Ah, mais je vous connais! Mon nom, Olivier Laprise, ne vous dit peut-être rien. Mon entreprise de vaisseau spatial se trouve justement dans le secteur IV de Naturalis. J’ai toujours approuvé vos décisions politiques. Je suppose que vous êtes ici sur Éden perdu pour négocier une alliance. J’ai cru comprendre en lisant les journaux électroniques que cette planète en a bien besoin.
Marcel, avant de répondre, jeta un rapide clin d’œil vers Gladys. Cette dernière rougit instantanément et s’apprêta à répondre. Mais Marcel l’en empêcha.
- Non, en fait, j’étais, avec ma famille, de retour de congés sur Terra One. Lors de l’escale, nous avons voulu profiter pour visiter un peu cette planète. C’était une erreur : nous avons raté le départ de notre fusée. C’est aussi bête que cela. Mais peut-être pourriez-vous nous aider, car Éden perdu n’est pas précisément un lieu ouvert à la saine habitude de nudité ?
- Vous aider, cela me ferait grand plaisir. Que puis-je faire pour vous?
- Ce serait de nous prendre à votre bord. Je suppose que vous regagnez Naturalis et c’est là où nous voulons nous rendre aussi.
L’homme se gratta la tête en esquissant un air gêné.
- Oui, je pourrais faire cela, mais il y a un gros problème. Mon vaisseau est un atelier dans lequel nous effectuons les livraisons et les réparations mineures. Il n’est pas aussi luxueux que le vaisseau que je viens de livrer. C’est le moins que l’on puisse dire. En fait, il aurait besoin d’un gros nettoyage. De plus, mon équipe se contente d’un confort minimum et le cuisinier est surtout spécialisé dans le réchauffage des plats congelés.
Marcel chercha à le rassurer.
- Ne vous inquiétez pas. Nous nous contenterons du minimum.
- Mais vous êtes huit et je n’ai pas assez de lits pour satisfaire…
- Non, nous sommes ou plutôt devrais-je dire ils sont sept. Moi-même, je retourne sur la planète avec le petit vaisseau.
C’était Samuel qui venait d’intervenir dans la discussion. Il continua en se tournant vers Marcel.
- Pendant que vous alerterez les autorités de Naturalis, de mon côté, je préparerai votre retour. Je suis certain qu’il y a parmi la population d'Eden Perdu des gens qui n’attendent qu’un sauveur. Je serai celui-là.
- Vous êtes courageux, mon ami. En tant que député, je vais faire tout mon possible pour revenir le plus tôt possible. Ce qui serait utile, ce serait que vous ayez avec vous un moyen de communication assez puissant pour que nous puissions échanger et ainsi préparer mon retour avec les autorités judiciaires.
- Malheureusement, mon beau-frère et quelques-uns de ses complices surveillent de près ce genre de choses. Comme dans toutes les sectes, il est très difficile de correspondre avec l’extérieur. J’ai bien des appareils, mais pas assez puissant pour atteindre Naturalis.
En entendant ces mots, Olivier Laprise intervint.
- Je peux résoudre votre problème. En tant que constructeur de vaisseaux, j’ai souvent besoin de communiquer avec le sol d’une planète. J’installe temporairement des satellites géostationnaires qui peuvent transmettre les messages. Un seul satellite ne couvre pas toute la planète, bien sûr. Il vous faudra me donner la position la plus intéressante pour vous.
Samuel n’hésita pas.
- Au-dessus du spatioport, ce serait parfait, monsieur Laprise. Ma cabane est à un jet de pierre de là. C’est aussi la zone la plus peuplée et je crois que je pourrais recruter certains membres. De plus, le fameux temple ou villa de luxe de mon cher beau-frère ne se trouve pas bien loin, lui non plus. C’est la région la plus prospère de la planète.
- Je vous fournis un radio en plus. Par contre, le signal n’est pas très fort. Naturalis est trop éloigné pour capter les ondes radio. Il vous faudra, monsieur le député, être au deux tiers de la distance entre les deux planètes pour entendre le message. Qu’en pensez-vous?
- Tout ce que vous pouvez faire pour nous aider sera le bienvenu. Ce que j’ai vu à la piscine du spatioport m’a révulsé et je crois aussi ce que nous a dit notre ami Samuel à propos de son beau-frère. J’ai lu plusieurs essais sur l’histoire des religions et cela me conforte dans l’idée que nous devons mettre le ho là sur ces activités dégoûtantes.
Tout le monde se regroupa autour de Samuel pour lui souhaiter bonne chance. Jessica et Victor laissèrent couler quelques larmes. Mais ce fut Gladys qui parut la plus émue par ce départ.
- Soyez prudent Samuel. Il y a des gens qui veulent vous revoir.
Elle pensait aux autres, mais peut-être aussi beaucoup à elle.