Histoire de Roger : Le monde à l'envers
Publié : 04 juin 2018, 10:27
AVERTISSEMENT : sans être porno ou scato, cette histoire s'adresse à un monde adulte. Il y a des scènes suggestives.
retrait « Une journée parfaite » : Cela avait été tout au moins le sentiment éprouvé par Valérie jusqu’à cet instant. Mais la porte du palier à peine refermée, la jeune fille, toujours assise dans le salon, un reste de bonheur sur les lèvres, avait écouté les pas dans l’escalier. À chacune des marches, au fur et à mesure que le claquement des talons se faisait moins sonore, le sourire figé se changea en rictus ; sa respiration évolua peu à peu pour devenir courte et saccadée comme si elle réalisait de plus en plus clairement l’erreur qu’elle venait de faire. Lorsque la lourde porte de la rue résonna dans la cage d’escalier la panique s’empara d’elle : les yeux exorbités, sa bouche dessina une grimace et ses mains se plaquèrent sur son visage horrifié. Elle crut voir « Le cri » de Munch dans le miroir du salon. C’était elle.
retrait« Mon Dieu ! Qu’ai-je fait ? »
retraitD’un bond, elle fut sur ses jambes ; elle se précipita vers le fond de l’appartement. Comme elle atteignait l’entrée, elle réalisa qu’il était trop tard. Ils n’étaient plus dans l’immeuble. Elle courut à l’opposé, vers le balcon ; le temps d’ouvrir la porte-fenêtre, la rue était déserte.
retrait Mon Dieu ! Qu’avait-elle fait ? Que devait-elle faire ? Sa première idée fut de téléphoner à sa mère, mais celle-ci était loin. Loin physiquement, à plus de trois cents kilomètres, et surtout loin sentimentalement de sa fille, une femme si parfaite, si rationnelle, si normale, sans aucune réaction émotive que c’en était écœurant. Elle ne pourrait rien faire sinon lui ressasser des reproches comme elle en avait l’habitude depuis une dizaine d’années. Non, ce serait augmenter la panique et l’angoisse. Puis soudain, un bruit de pas au plafond lui rendit l’espoir : sa voisine du dessus, Ginette saurait quoi faire. Elle était travailleuse sociale ou quelque chose dans le genre : la situation actuelle était en plein dans ses cordes. Fébrilement, elle composa son numéro.
retrait — Ginette ! C’est Valérie, la locataire d’en dessous... Oui, c’est cela avec la queue de cheval... Non, je n’ai pas encore eu le temps de monter chez vous à cause de mon... oui, justement, c’est de lui dont je veux vous parler... Je vous appelle parce que j’ai fait une grosse bêtise et je n’ai personne à qui m’adresser... Oui, oui, j’aimerais cela que vous veniez tout de suite. Non, il n’est pas là, c’est pour cela que j’ai besoin de votre aide... Oui d’accord, je vous attends. Je vais vous ouvrir la porte.
LE MONDE A L’ENVERS
de
Roger Schaeffer
CHAPITRE UNde
Roger Schaeffer
retrait « Une journée parfaite » : Cela avait été tout au moins le sentiment éprouvé par Valérie jusqu’à cet instant. Mais la porte du palier à peine refermée, la jeune fille, toujours assise dans le salon, un reste de bonheur sur les lèvres, avait écouté les pas dans l’escalier. À chacune des marches, au fur et à mesure que le claquement des talons se faisait moins sonore, le sourire figé se changea en rictus ; sa respiration évolua peu à peu pour devenir courte et saccadée comme si elle réalisait de plus en plus clairement l’erreur qu’elle venait de faire. Lorsque la lourde porte de la rue résonna dans la cage d’escalier la panique s’empara d’elle : les yeux exorbités, sa bouche dessina une grimace et ses mains se plaquèrent sur son visage horrifié. Elle crut voir « Le cri » de Munch dans le miroir du salon. C’était elle.
retrait« Mon Dieu ! Qu’ai-je fait ? »
retraitD’un bond, elle fut sur ses jambes ; elle se précipita vers le fond de l’appartement. Comme elle atteignait l’entrée, elle réalisa qu’il était trop tard. Ils n’étaient plus dans l’immeuble. Elle courut à l’opposé, vers le balcon ; le temps d’ouvrir la porte-fenêtre, la rue était déserte.
retrait Mon Dieu ! Qu’avait-elle fait ? Que devait-elle faire ? Sa première idée fut de téléphoner à sa mère, mais celle-ci était loin. Loin physiquement, à plus de trois cents kilomètres, et surtout loin sentimentalement de sa fille, une femme si parfaite, si rationnelle, si normale, sans aucune réaction émotive que c’en était écœurant. Elle ne pourrait rien faire sinon lui ressasser des reproches comme elle en avait l’habitude depuis une dizaine d’années. Non, ce serait augmenter la panique et l’angoisse. Puis soudain, un bruit de pas au plafond lui rendit l’espoir : sa voisine du dessus, Ginette saurait quoi faire. Elle était travailleuse sociale ou quelque chose dans le genre : la situation actuelle était en plein dans ses cordes. Fébrilement, elle composa son numéro.
retrait — Ginette ! C’est Valérie, la locataire d’en dessous... Oui, c’est cela avec la queue de cheval... Non, je n’ai pas encore eu le temps de monter chez vous à cause de mon... oui, justement, c’est de lui dont je veux vous parler... Je vous appelle parce que j’ai fait une grosse bêtise et je n’ai personne à qui m’adresser... Oui, oui, j’aimerais cela que vous veniez tout de suite. Non, il n’est pas là, c’est pour cela que j’ai besoin de votre aide... Oui d’accord, je vous attends. Je vais vous ouvrir la porte.