Histoires de Cor; Vatican 2 1/2
Publié : 26 janv. 2017, 00:39
Vatican 2 ½
Par Cor van de Sande
D’après une idée originale par Cor van de Sande
© Cor van de Sande, 2013
Cette nouvelle est basée sur les personnages et les endroits introduits dans l’histoire
“My House, My Rules” by Cor van de Sande en 2012
Premier épisode ; Une visite inattendue
L’homme, malgré sa carrure, se déplaça avec la fluidité et l’économie de mouvement d’un chat. Bien que cette journée de printemps fut quand même assez chaude, il portait veston et pantalon noirs, avec une chemise à collet romain amidonné, toute noire. Il mesurait un bon mètre quatre-vingts, peut-être un peu plus, avec de larges épaules carrées et des mains de la grandeur d’une palette de ping-pong. En gros, il avait l’air d’un joueur de football de la défensive ; une armoire-à-glace, comme on disait chez nous.
Il avait laissé sa voiture aux abords du village et descendait la route principale à pieds. Tout en marchant, les bras légèrement écartés de son corps, son regard bougea continuellement à droite, à gauche, comme à l’affut d’un piège ou d’une embuscade. Arrivé à la hauteur de la petite église anglicane, il arrêta et tourna lentement sur lui-même pour regarder tout autour. D’un geste machinal, inconscient, il leva la main à son front et caressa la longue cicatrice gravée juste au-dessus de l’arcade de son œil droit. Il hésita encore un instant puis se dirigea vers la petite église en bardeaux blancs. Montant les marches, il essaya la porte mais ne fut aucunement surpris de constater qu’elle était barrée.
Debout, devant la porte, il entendit le bruit d’une pelle frappant une roche et venant de derrière l’église. Il descendit la rampe de chaise roulante, contourna la main courante et longea le côté de l’église vers l’arrière. Arrivé à la hauteur du coin de la bâtisse, il figea sur place – devant lui, il y avait un genre de jardin communautaire avec des platebandes délimitées par des poutres de deux par huit goudronnées d’un préservatif foncé. Le bruit qu’il venait d’entendre avait été fait par un couple dans la soixantaine bien tassée qui travaillaient l’une des platebandes, sans le moindre bout de linge sur le dos. Il allait reculer discrètement quand l’homme du couple leva les yeux.
« Yes ? May I help you ? Est-ce que je peux vous aider, » demanda-t-il.
« Excusez-moi, je ne voudrais pas vous déranger, » dit l’homme au collet romain.
« No, no… venez. Approchez. Vous ne nous dérangez pas du tout. »
« Mais, vous… votre… »
« … Costume ? Nous labourons dans le jardin du Seigneur dans le costume qu’Il nous a fourni. » Il partit à rire. « De toute façon, ce costume-ci est bigrement plus facile à nettoyer que n’importe quoi d’autre. » Le vieillard passa sa pelle à sa femme, s’essuya les mains sur ses fesses et approcha, la main tendue pour accueillir le visiteur.
« Bonjour, je suis James Athelstone, je suis le pasteur ici, et voici mon épouse, Sarah. »
« Euh… bonjour, » dit l’homme en lui secouant la main. « Moi, je suis Richard Poirier, le nouveau curé à Saint Ignace. »
« Ah, oui ? Excellent. Je suis vraiment content de faire votre connaissance. Si vous me donnez cinq minutes pour me ramasser quelque peu, nous pourrions nous installer plus confortablement dans le presbytère. »
Tandis que Sarah ramassa les pots à fleurs vides et les mit dans la petite brouette pour la traîner vers la remise, le révérend Athelstone ramassa pelle et pioche pour les amener également à la remise. Il était à se rincer sous la douche extérieure quand une jeune demoiselle fit le tour de l’église et arrêta devant lui.
« Mon révérend, … » commença-t-elle, mais il l’interrompt.
« Tut, tut, Mam’zelle, les manières, s’il-te-plaît. Aelwen, je te présente le Père Richard Poirier. Mon Père, je vous présente Mlle Aelwen Owens. J’imagine que, techniquement, elle est l’une de vos paroissiennes. »
Pendant que le révérend Athelstone faisait les introductions, le Père Poirier regarda la jeune femme d’environs dix-neuf ans. C’était une grande mince aux cheveux rousses et des taches de rousseur plein le visage, au cou et aux bras. Elle portait des jeans « stretchy » super-moulants et un tee-shirt trois tailles trop grande avec, sur le devant, le logo d’un cercle et un dessin d’une paire de fesses nues et les mots « Happiness is no tan lines ». Ce qui le surprit le plus, par contre, était que la fille ne sembla pas du tout surprise ni affectée du fait que le révérend soit complètement nu.
« Excusez-moi, mon père, je ne voulais pas vous manquer de respect. »
Le Père Poirier fit un geste négligent de la main. « Bonjour… Aelwen ? C’est un nom inusité, n’est-ce pas ? »
« Plutôt, oui, » ria-t-elle. « Vous ne saurez jamais à quel point qu’on m’a taquinée à ce sujet, étant jeune. C’est censé signifier ‘front gracieux’. Mes parents m’ont toujours dit qu’ils voulaient me donner un nom traditionnel du Pays de Gales mais moi, je suis convaincue qu’ils étaient plutôt sur un trip de « Seigneur des Anneaux » quand ma mère a accouchée de moi, » dit-elle avec le sourire.
Entretemps, le révérend Athelstone avait fini avec sa douche et s’était essuyé. « Bon, Mam’zelle, c’était quoi qui était si urgent ? »
Aelwen avait l’air perdue pour un instant. « Euh… Ah, oui ! J’ai croisé Kenzie tantôt. Elle était à vérifier si ses pommiers avaient beaucoup de fleurs cette année. Elle m’a demandé de vous dire que Skinflint avait fini de construire son étable et qu’il aimerait que vous fassiez un tour pour le bénir quand ça adonnera. »
« D’accord, merci. Si tu la revois avant moi, dis-lui que je passerai en toute probabilité demain dans l’après-midi. Dis, il devrait approcher cinq heures, n’est-ce pas ? Tu n’es pas censée être de service ce soir ? »
« Oui, effectivement. D’ailleurs c’est là que j’allais. Je ne suis arrêtée ici que parce que je savais que Sarah avait été acheter des plants de tomates au centre de jardinage. Je vous laisse, mon révérend, mon père. Si vous passez par l’auberge, je vous paie à souper, » et elle est partit à rire.
Le révérend Athelstone partit à également à rire et dit « allez, ouste, petite diablotine, va travailler, » tandis que le Père Poirier les regardait tous les deux, confus.
« Je ne comprends pas. »
« L’auberge est un peu surprenante, à première vue. Elle est construite dans le style des auberges anglaises de la fin du dix-huitième siècle. Sa brasserie vend surtout des produits fabriqués sur place. Les repas y sont excellents et la cuisine se spécialise dans les produits du terroir local, bien que la carte soit quelque peu dégarnie, les prix sont plus que raisonnables. C’est que le propriétaire a des idées arrêtées sur la tenue vestimentaire exigée ; la nudité intégrale y est de rigueur. »
Par Cor van de Sande
D’après une idée originale par Cor van de Sande
© Cor van de Sande, 2013
Cette nouvelle est basée sur les personnages et les endroits introduits dans l’histoire
“My House, My Rules” by Cor van de Sande en 2012
Premier épisode ; Une visite inattendue
L’homme, malgré sa carrure, se déplaça avec la fluidité et l’économie de mouvement d’un chat. Bien que cette journée de printemps fut quand même assez chaude, il portait veston et pantalon noirs, avec une chemise à collet romain amidonné, toute noire. Il mesurait un bon mètre quatre-vingts, peut-être un peu plus, avec de larges épaules carrées et des mains de la grandeur d’une palette de ping-pong. En gros, il avait l’air d’un joueur de football de la défensive ; une armoire-à-glace, comme on disait chez nous.
Il avait laissé sa voiture aux abords du village et descendait la route principale à pieds. Tout en marchant, les bras légèrement écartés de son corps, son regard bougea continuellement à droite, à gauche, comme à l’affut d’un piège ou d’une embuscade. Arrivé à la hauteur de la petite église anglicane, il arrêta et tourna lentement sur lui-même pour regarder tout autour. D’un geste machinal, inconscient, il leva la main à son front et caressa la longue cicatrice gravée juste au-dessus de l’arcade de son œil droit. Il hésita encore un instant puis se dirigea vers la petite église en bardeaux blancs. Montant les marches, il essaya la porte mais ne fut aucunement surpris de constater qu’elle était barrée.
Debout, devant la porte, il entendit le bruit d’une pelle frappant une roche et venant de derrière l’église. Il descendit la rampe de chaise roulante, contourna la main courante et longea le côté de l’église vers l’arrière. Arrivé à la hauteur du coin de la bâtisse, il figea sur place – devant lui, il y avait un genre de jardin communautaire avec des platebandes délimitées par des poutres de deux par huit goudronnées d’un préservatif foncé. Le bruit qu’il venait d’entendre avait été fait par un couple dans la soixantaine bien tassée qui travaillaient l’une des platebandes, sans le moindre bout de linge sur le dos. Il allait reculer discrètement quand l’homme du couple leva les yeux.
« Yes ? May I help you ? Est-ce que je peux vous aider, » demanda-t-il.
« Excusez-moi, je ne voudrais pas vous déranger, » dit l’homme au collet romain.
« No, no… venez. Approchez. Vous ne nous dérangez pas du tout. »
« Mais, vous… votre… »
« … Costume ? Nous labourons dans le jardin du Seigneur dans le costume qu’Il nous a fourni. » Il partit à rire. « De toute façon, ce costume-ci est bigrement plus facile à nettoyer que n’importe quoi d’autre. » Le vieillard passa sa pelle à sa femme, s’essuya les mains sur ses fesses et approcha, la main tendue pour accueillir le visiteur.
« Bonjour, je suis James Athelstone, je suis le pasteur ici, et voici mon épouse, Sarah. »
« Euh… bonjour, » dit l’homme en lui secouant la main. « Moi, je suis Richard Poirier, le nouveau curé à Saint Ignace. »
« Ah, oui ? Excellent. Je suis vraiment content de faire votre connaissance. Si vous me donnez cinq minutes pour me ramasser quelque peu, nous pourrions nous installer plus confortablement dans le presbytère. »
Tandis que Sarah ramassa les pots à fleurs vides et les mit dans la petite brouette pour la traîner vers la remise, le révérend Athelstone ramassa pelle et pioche pour les amener également à la remise. Il était à se rincer sous la douche extérieure quand une jeune demoiselle fit le tour de l’église et arrêta devant lui.
« Mon révérend, … » commença-t-elle, mais il l’interrompt.
« Tut, tut, Mam’zelle, les manières, s’il-te-plaît. Aelwen, je te présente le Père Richard Poirier. Mon Père, je vous présente Mlle Aelwen Owens. J’imagine que, techniquement, elle est l’une de vos paroissiennes. »
Pendant que le révérend Athelstone faisait les introductions, le Père Poirier regarda la jeune femme d’environs dix-neuf ans. C’était une grande mince aux cheveux rousses et des taches de rousseur plein le visage, au cou et aux bras. Elle portait des jeans « stretchy » super-moulants et un tee-shirt trois tailles trop grande avec, sur le devant, le logo d’un cercle et un dessin d’une paire de fesses nues et les mots « Happiness is no tan lines ». Ce qui le surprit le plus, par contre, était que la fille ne sembla pas du tout surprise ni affectée du fait que le révérend soit complètement nu.
« Excusez-moi, mon père, je ne voulais pas vous manquer de respect. »
Le Père Poirier fit un geste négligent de la main. « Bonjour… Aelwen ? C’est un nom inusité, n’est-ce pas ? »
« Plutôt, oui, » ria-t-elle. « Vous ne saurez jamais à quel point qu’on m’a taquinée à ce sujet, étant jeune. C’est censé signifier ‘front gracieux’. Mes parents m’ont toujours dit qu’ils voulaient me donner un nom traditionnel du Pays de Gales mais moi, je suis convaincue qu’ils étaient plutôt sur un trip de « Seigneur des Anneaux » quand ma mère a accouchée de moi, » dit-elle avec le sourire.
Entretemps, le révérend Athelstone avait fini avec sa douche et s’était essuyé. « Bon, Mam’zelle, c’était quoi qui était si urgent ? »
Aelwen avait l’air perdue pour un instant. « Euh… Ah, oui ! J’ai croisé Kenzie tantôt. Elle était à vérifier si ses pommiers avaient beaucoup de fleurs cette année. Elle m’a demandé de vous dire que Skinflint avait fini de construire son étable et qu’il aimerait que vous fassiez un tour pour le bénir quand ça adonnera. »
« D’accord, merci. Si tu la revois avant moi, dis-lui que je passerai en toute probabilité demain dans l’après-midi. Dis, il devrait approcher cinq heures, n’est-ce pas ? Tu n’es pas censée être de service ce soir ? »
« Oui, effectivement. D’ailleurs c’est là que j’allais. Je ne suis arrêtée ici que parce que je savais que Sarah avait été acheter des plants de tomates au centre de jardinage. Je vous laisse, mon révérend, mon père. Si vous passez par l’auberge, je vous paie à souper, » et elle est partit à rire.
Le révérend Athelstone partit à également à rire et dit « allez, ouste, petite diablotine, va travailler, » tandis que le Père Poirier les regardait tous les deux, confus.
« Je ne comprends pas. »
« L’auberge est un peu surprenante, à première vue. Elle est construite dans le style des auberges anglaises de la fin du dix-huitième siècle. Sa brasserie vend surtout des produits fabriqués sur place. Les repas y sont excellents et la cuisine se spécialise dans les produits du terroir local, bien que la carte soit quelque peu dégarnie, les prix sont plus que raisonnables. C’est que le propriétaire a des idées arrêtées sur la tenue vestimentaire exigée ; la nudité intégrale y est de rigueur. »