Partie 6
Puisqu’elle était sortie faire faire des tournées aux touristes toute la semaine, elle ne put suivre le progrès des étapes du Tour en temps réel mais elle prit l’habitude de rejoindre Yvette, Pierre et Jean pour le résumé des points saillants le soir. Le travail semblait mieux se passer également. Les voyageurs britanniques parmi ses groupes n’étaient peut-être pas plus informés sur les attraits touristiques et artistiques mais ils démontraient quand même un intérêt pour la visite. Chloé trouva sa amusant quand une vieille bonne femme lui complimentait sur sa maîtrise de la langue anglaise, qu’elle puisse lui avouer son secret, aux rires de chacun d’elles.
Même si Pierre et Jean suivirent le déroulement de la course du jour sur leurs téléphones quand ils furent sur la route, ils ne dévoilèrent pas ce qu’ils savaient avant que l’émission du résumé soit télévisée. Mercredi, toutefois, Yvette et Chloé notèrent tous deux que Pierre et Jean étaient agités. À mesure que le décompte de la course progressa, ils ne purent pas s’empêcher de zieuter l’affichage du compte à rebours jusqu’à la fin de l’étape.
Du coup, avec cent kilomètres à parcourir, la scène devint une de carnage généralisé ; la caméra fixe parmi une mêlée de cyclistes par terre et de véhicules d’équipe arrêtés, avec des mécaniciens qui couraient partout avec des vélos de rechange et des médecins d’équipe qui vérifiaient ceux qui avaient tombés. Un chien avait traversé le chemin juste devant le peloton et la cascade de collisions avait fauché quelques quarante cyclistes et emprisonné la plupart des autres. Quelques uns, au tout début de la meute, purent faire une fuite en profitant de la malchance de leurs rivaux.
Le commentateur vint juste de s’interroger sur l’état du maillot jaune quand une caméra l’a isolé de la foule, boitant de douleur avec un coéquipier tenant son vélo. Puis la vue changea de nouveau, avec Scott, son maillot blanc déchiré et recouvert de sang, se faisant examiné par un médecin d’équipe. Le médecin passa ses mains sur ses épaules et le long de ses clavicules.
« Oh, Dieu, non ! S’il te plaît, pas sa clavicule, » cria Chloé, recouvrant sa bouche avec sa main.
Jean prit sa main libre. « C’est bon, tu vas voir. »
Le docteur donna Scott une tape sur l’épaule, un mécano avança en vitesse pour échanger son vélo pour un vélo de rechange et Scott était de nouveau parti avec ses coéquipiers en poursuite. Le maillot jaune était, lui aussi, sur la route de nouveau et se faisait escorté vers le devant du peloton de fortune. Tandis que le groupe se reforma graduellement des restants de ceux qui avaient réussis de se remettre sur pied, Scott passa à côté de la voiture du médecin volant pour se faire panser. Il avait une mauvaise plaie sur son avant-bras gauche et une éraflure sur la fesse gauche, évidente sous la déchirure de ses shorts. Il n’y avait rien à faire pour sa fesse sauf de vaporiser la zone d’un antiseptique. La plaie au bras, toutefois, était nettoyée et pansée puis recouverte d’un filet expansible, tout pendant que Scott continua sa course.
Suite à une annonce publicitaire, la caméra se concentra sur le groupe en poursuite tandis que l’équipe du maillot jaune et celle du maillot blanc tiraient sur la meule pour rattraper les fuyards. Les commentateurs ne furent aucunement impressionnés par le fuyards car c’est un manquement à l’éthique d’attaquer le maillot jaune pendant qu’il est impliqué dans une collision. Le rival de Scott pour le maillot blanc se trouva parmi les fuyards et, puisque par sa fuite, il mit le standing du maillot jaune en danger, il y a eu encore une entente tacite entre les deux équipes ainsi qu’avec celles avec un sprinter qui souhaitaient une chance à gagner sur la droite de la fin.
À mesure qu’ils rattrapèrent l’échappée déloyale, l’équipe du maillot jaune continua à attaquer bien que la position du maillot jaune fut de nouveau sécurisée. Il voulut complètement rattraper son déficit et, en plus, il avait une dette envers Scott. Quand les fuyards furent rattrapés, Scott étendit sa main au maillot jaune et ils secouèrent, en remerciement et en reconnaissance de respect mutuel. Chloé les a regardés faire et reconnut le geste que Scott avait partagé avec cette fille, jadis ; c’était du respect, et rien de plus. Yvette, Pierre et Jean auraient pu croire que les larmes de Chloé en étaient de soulagement que Scott réussit à défendre sa position mais pour Chloé, c’était plus que ça, beaucoup plus.
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Ce soir-là, après son massage et le souper, Scott se promena à travers le complexe de l’équipe qui fut établit dans l’enclos de l’hôtel pour cette nuitée. Il échangea des salutations avec le personnel de soutien pendant qu’ils se préparaient pour le lendemain. En approchant le fourgon de service, il vit l’objet de ses soucis ; le vélo qui lui avait été retiré suite à la collision.« Hé, Günter, » appela-t-il en allemand au mécano-en-chef, « ce sont quoi les dégâts ? » Il indiqua son vélo.
« Pas grand chose ; un support de dérailleur tordu et du scotch de guidon éraflé. J’étais sur le point de le démonter, le nettoyer et le préparer pour demain. »
« Puis-je, » demanda Scott, attrapant un jeu de clés ‘Allen’.
« Fais comme chez-toi, » dit Günter, « mais je vais devoir passer derrière avec une clé dynamométrique. Je ne veux pas que rien ne va de travers, il y va de ma réputation. »
Scott s’est mis à démonter le pignon arrière pour pouvoir accéder au dérailleur. Son vélo de rechange était tout-à-fait de la même construction et réglages que celui-ci mais il s’était promis d’amener celui-ci à Paris. Aillant retiré le vieux support de dérailleur, il obtint un nouveau de Günter et le fixa en place avant de remonter le pignon arrière.
« Bon, voilà… je suis mieux de laisser le reste pour toi. Je suis pas mal certain que David serait mécontent s’il me trouvait ici à bricoler quand je suis sensé me reposer. »
Günter indiqua le lavabo, pour que Scott se nettoie les mains avant de partir et s’est mis à terminer le travail sur le vélo de Scott.
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Au grand soulagement des nerfs d’Yvette et de Chloé, la course de jeudi s’est déroulée sans anicroches. Pierre et Jean passèrent encore une fois, avec Pierre qui promit que Jean et lui iraient chercher une nouvelle télé la fin de semaine. Ni Chloé, ni Yvette ne se sentaient imposée par leur présence car, après tout, Pierre était le chum d’Yvette et Jean commença à se détendre avec la nudité des autres. Chloé leur avait préparé un souper pendant qu’ils regardèrent les faits saillants et Pierre avait apporté une bouteille de ‘vin ordinaire’.Vendredi, toutefois, avant que Pierre et Jean devaient arriver, on cogna à la porte de l’appartement. Chloé regarda Yvette curieusement tandis qu’Yvette courra pour répondre. « J’y vais, » appela-t-elle, déjà en route.
Chloé entendit un instant de ricanement avant qu’Yvette ouvrit grand la porte.
« Surprise ! » cria Jess tandis qu’elle et Stuart rentrèrent au salon.
« Jess ! » Chloé sauté debout, courut à travers le salon et sauta dans ses bras avec une accolade chaleureuse et un bizou. Elle fit alors le même avec Stuart. « Allons ; allons prendre un peu de soleil sur la terrasse. Êtes-vous ici pour regarder la fin du Tour ? »
Jess et Stuart ne dirent rien pour un instant pendant qu’ils se déshabillèrent mais se regardèrent comme pour s’interroger sur comment répondre.
« Ça, va, elle le sait, » dit Yvette, aillant deviné quoi Jess et Stuart gardaient pour eux.
« Elle le sait et…, » demanda Jess.
Chloé répondit « Elle sait et comprend à quel point elle a été sotte. »
Jess enveloppa Chloé dans une nouvelle accolade. « C’est quoi qui t’a fait changer d’idée ? »
Chloé n’eut pas besoin d’expliquer car Yvette avait ramassé le journal et l’avait ouvert à la photo de la ligne d’arrivée.
« Ils disent qu’une image vaut mille mots, » dit Chloé. « Il disait la vérité depuis tout ce temps mais jamais avait-il dit ‘Je t’aime’ aussi clairement que ça. »
« Alors, » dit Stuart, « la question se pose maintenant de comment que toi, tu vas lui dire que tu l’aimes. »
« Oh… ? Je ne sais pas, » dit Chloé. « Je ne sais même pas comment le contacter. »
« Nous, oui, » dit Jess, « mais c’est difficile pendant qu’il est sur le Tour car il n’ouvre son téléphone pour une heure chaque soir. Il y aura la fête de l’équipe dimanche mais ça, c’est un événement RSVP alors je doute que t’arriverais à y accéder. Si j’avais le nom de son agent, nous pourrions peut-être passer pas lui. »
« Pourrais-tu prendre la semaine prochaine en congé, » lui demanda Stuart.
« Je ne crois pas, non ; pas avec si peu d’avis. Pourquoi ? »
« Jess et moi allons rester avec lui et sa famille chez lui près des Pyrénées. »
« Tu sera étonnée de voir à quel point Dawn a grandi, » ajouta Jess.
« Nous pourrions simplement aller à la présentation aux Champs Élysées et crier pour lui, » dit Yvette.
« Jess et moi avons des place aux tribunes pour la finale donc quand nous le verrons, nous pourrons lui dire que tu y es. »
À ce moment-là, on cogna de nouveau à la porte et Yvette est allée répondre. Pierre et Jean entrèrent et il y a eu une ronde d’introductions entre les nouveaux-venus et Jess et Stuart. Pierre sortit les verres et fit circuler sa bouteille de rouge. Puis. C’était l’heure des points saillants de la course et toute discussion de la difficulté de Chloé cessa.
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