Chapitre 10 ; Invasion
Partie 9
Bien que la météo avait annoncée qu’il serait ensoleillé jusqu’à la fin de semaine, Chloé se réveilla aux doux sons de la pluie sur la toile de la tente. Elle se leva, enfila un chandail et sortit du dortoir intérieur de la tente pour remplir la bouilloire avec l’eau de la cruche et l’a mise à chauffer sur l’un des bruleurs du réchaud de camping. Scott eut sans doute entendu Chloé se lever car quelques instants plus tard, lui aussi se leva ne portant qu’un chandail. Ils se sont accueillis avec un baiser et une accolade serrée, leurs bras les resserrant au tour de leurs torses. Leurs sentiments pour l’un et l’autre n’eut besoin d’aucune explication ni justification. Ils se sont séparés quelque peu et continuaient de se regarder dans les yeux, nez-à-nez. Juste là, Jess sortit, elle aussi, du dortoir. Jess ne s’est aucunement sentie de trop de les voir ainsi et Chloé et Scott, non plus, ne furent le moindrement gênés d’être pris sur le fait. Ils ne firent que se donner un dernier baiser et se sont mis à préparer des boissons chaudes pour démarrer la journée.
Leurs boissons en main, Chloé, Scott et Jess sortirent de la tente pour s’assoir sous l’avent et regardèrent tandis que le camping naturiste se réveilla tranquillement. Scott trouva ça curieux, quoique logique, que plusieurs sortirent de leurs abris avec des boissons et des robes de chambre contre la fraicheur du matin. Comme dans tous les groupes, il y avait un comique ; celui-ci partit pour les douches dans la section textile du camping, non seulement en robe de chambre mais aussi avec des palmes, un masque de plongeur avec un tuba. Chloé partit à rire quand elle comprit – c’était un commentaire sur la situation insensée d’être obligé à se vêtir pour aller se laver. Scott, quant à lui, se dit que ce n’était pas surprenant que les textiles trouvaient que les naturistes soient des oiseaux bizarres.
Lentement, le groupe s’est recueilli pour le déjeuner. Bien qu’ils aient déjà mangé, les Schmidt et les Simon se sont présentés pour discuter du déroulement de la journée puisque la plage serait hors de question. Beth proposa de faire une visite des environs et peut-être un peu de magasinage ; Henk tenait toujours à utiliser son barbecue. Il y avait des épiceries à Porthmadog et il y avait aussi un manège, un train à vapeur miniature qui amuserait sans doute les plus jeunes pour une grande partie de la journée. Une vérification rapide auprès du gérant du site confirma que le train allait directement vers Porthmadog à partir de la gare à Dyffryn Ardudwy, que quelques pas en passant par le centre de villégiature et le long de l’allée vers la route principale.
Quelqu’un devrait prendre une voiture de toute façon pour ramener les courses à la fin de la journée. Les ados simplifièrent les choses en disant qu’ils préféreraient rester ensemble et ils partirent, avec Robert et Ben, vers la gare. Susan appela derrière eux pour vérifier s’ils avaient suffisamment d’argent pour les billets. Le plus logique fut que Beth prenne la monospace puisque cette voiture pouvait transporter le plus de monde. Yvette aurait agi en traductrice pour ses parents mais Henk et Lena étaient tous les deux polyglottes alors ils accompagnèrent les trois Simon restants avec Beth et Max. Les Musgrove iraient à part puisque personne d’autre ne pourrait s’insérer dans le peu d’espace disponible. Il resta des espaces dans la voiture des Schmidt que prirent Susan et Jenny. Beth fit un décompte rapide pour s’assurer que personne ne fut oublié et le groupe partit.
-O-O-
La grisaille galloise avait cessé au moment que tous se rencontrèrent à la gare de Porthmadog, ce qui fit remonter la morale des troupes. Heureusement pour Yvette et Stefan, le français de Thomas était suffisant pour pouvoir communiquer avec Jean-René et Sylvie, alors ils n’étaient pas obligés de faire le tour du train miniature. Ce n’était pas qu’ils détestèrent rester avec leurs parents mais le but de tout ce voyage était que les ados puissent être ensemble.
Porthmadog n’avait pas grand-chose qui pouvait intéresser les sept ados naturistes ainsi que Robert et Ben qui les ont suivis. Après avoir fait le tour des boutiques pour des articles touristiques typiques et le musée maritime, Scott et Famke proposèrent que, plutôt de suivre les adultes, les ados se promènent à leur rythme et qu’ils se rencontrent tous de nouveau à la gare pour le voyage de retour
La chose prioritaire dans les pensées de Scott, Chloé, Jess et Stuart, dès qu’ils furent libérés de la supervision parentale, était de trouver un endroit qui servit des consommations digne de ce nom. Finalement, le long de la route principale, ils trouvèrent une boutique de crème glacée qui servit de bons cafés italiens. Stuart et Chloé ont traité Ben et Robert aux premiers cappuccinos qu’ils eurent consommés, avec des granules de chocolat par-dessus, et ils commencèrent à parler.
« Vous savez, c’est drôle que nous sommes ici, comme ceci, » réfléchit Jess tout haut. « Que nous soyons d’accord ou non, ce monde est textile. Si nous voulons une vie le moindrement normale, cela veut dire que nous devons nous habiller. »
« Je me le demande, » commença Famke. « Ce que j’ai entendu à propos de gros centres naturistes aux États Unis ; est-ce vraie ? Je veux dire qu’un jeune pourrait grandir à vivre nu tous les jours jusqu’à temps qu’il déménage pour aller à l’université ou pour aller se trouver un emploi. »
« Je ne le sais pas, » dit Scott. « Un tel endroit devrait être vraiment immense pour qu’il puisse exister. Quand je me faisais enseigner à la maison, je me suis senti vraiment seul et isolé. Des centres comme ça devront être tellement grands, pour qu’il y ait assez de jeunes pour qu’ils puissent interagir, alors je doute qu’ils existent, soit ça ou il y a un tas de jeunes naturistes solitaires aux États. »
« Moi, je crois que nous ne sommes pas si mal, Scott, » dit Stuart. « Après tout, nous avons nos familles, nos blondes, » il serra la main de Jess par-dessus la table, « nos meilleurs amis et, pour moi, des nouveaux amis. De qui d’autre aurions-nous besoin ? Je m’en fous que nous devons nous habiller quand nous sortons à l’occasion et que nous devons garder notre mode de vie secret quand nous avons tout ça. »
« Oui, nous sommes chanceux, tous les deux, » dit Scott. « Mais je souhaiterais qu’un jour, je pourrais vivre en tant que naturiste sans que ce soit une modification d’une vie textile. »
Avec leurs cafés terminés, les sept ados et les deux préados se sont tous achetés des crèmes glacées et se sont installés à regarder le port où de petits yachts se déplacèrent dans la marée montante. Le temps passa facilement tandis que les jeunes parlèrent de tout et de rien. Tout d’un coup, ils réalisèrent qu’ils étaient en retard et qu’ils manqueraient le train s’ils ne se dépêcheraient pas. Stuart était le premier à arriver, complètement hors d’halène. Scott fut quelques pas derrière mais n’était pas aussi éreinté. Robert et Ben arrivèrent presqu’à égalité dans les trente secondes plus tard, avec Robert légèrement en tête. Stefan et les filles sont arrivés en joggant ensemble presque sans effort avec encore quelques minutes avant que le train arriva. Scott était en colère pour lui-même, se voulant parce que sa nature compétitive a eu gain de cause, surtout que la journée était censée être journée de repos.
-O-O-
Jeudi avait commencé chaud et sec à Edenfield, quoique la météo annonça qu’il y aurait de la pluie plus tard. Deux filles qui étaient sensées venir aider Emma à nettoyer les écuries en échange de cours à taux réduits lui avaient, encore une fois, faussées compagnie. Elles étaient probablement parties en vacances mais elles auraient dus aviser Emma, afin qu’elle puisse trouver quelqu’un d’autre. Toutefois, étant donné qu’elle manquait de personnel, elle dû elle-même s’occuper de plus de box que sa part ; elle ne pouvait pas, après tout, refiler tout ce travail à Jocelyne.
Le livre qu’Emma lisait discutait de la raison d’être des vêtements. Elle avait chaud et en sueur et le linge qu’elle porta n’empêcherait aucunement la nécessité d’une douche plus tard. Le but des vêtements dans cette situation se résuma donc à lui garder de la vue des autres. Il n’y avait que Jocelyne qui travaillait dans l’autre écurie. Ça réglait tout ; sa chemise prendrait le bord ! La nudité partielle n’était pas impur en soi, disait le livre ; il y avait une raison valable et, en plus, elle n’était même pas torse-nu, elle portait encore sa brassière.
« Aimerais-tu quelque chose de froid à boire, » demanda une voix.
C’était Jocelyne. Emma sauta pour renfiler sa chemise.
« Laisse tomber ; il fait chaud. J’aurais fait la même chose si j’aurais su que tu sois ouverte à ça, » dit Jocelyne.
« J’adorais quelque chose, » répondit Emma, contournant le sujet.
Jocelyne partit pour la cuisine de la ferme et prépara deux verres de jus d’orange avec de la glace et revint à la cour de l’écurie. Habituellement, Emma aurait continué à travailler tout en buvant son jus mais, cette fois-ci elle s’assit sur un banc dehors et signa Jocelyne de venir la rejoindre.
« Jocelyne, j’aimerais ton opinion sur quelque chose. »
Jocelyne écouta.
« L’autre jour, Henk, le père de Famke, m’a proposé de transformer les champs arrières en camping naturiste. Je suis navrée d’avouer que j’ai été plus qu’impolie avec lui, traitant les naturistes de pervers entre autres. Ce qui me bouleverse est que j’ai appris par la suite que les quatre filles qui ont fait la randonnée dimanche dernier étaient toutes naturistes et que mes idées préconçues du naturisme n’accordaient aucunement avec mon impression d’elles. J’ai donc parlé avec un vicaire de mes amis et je me suis rendue compte que j’ai eu tort d’être aussi méprisante. Par contre, j’aimerais savoir ce qu’une jeune personne pourrait penser de ça, si cela ne te gêne pas trop. »
« En fait, » dit Jocelyne, « quand nous étions montées, tous ensemble, sur l’aller, Famke a laissé échapper qu’elle, Yvette, Chloé et le garçon que nous avions juste rencontré avaient tous fait de l’équitation nu en vacances, en France. Elle dit que la plupart de l’Europe avait une attitude plus ouverte au sujet du corps humain et de la nudité qu’en Grande Bretagne. De ce qu’elle me dit, rien de plus ne se passait à ces centres de vacances que des gens qui s’amusaient comme n’importe qui, sauf sans vêtements. »
« Et si nous transformions les champs arrières en camping naturiste ? Serait-ce un problème, » demanda Emma.
« Je ne serais pas forcée à les regarder, non ? Je ne vois pas où serait le problème, tant qu’ils ne font pas peur aux chevaux. Merde, si nous pourrions convaincre quelques-uns de nous aider lors d’une journée comme celle-ci, je les laisserais même nettoyer les écuries tous nus. »
« Tantôt…, » dit Emma, « je n’étais pas… j’avais chaud. »
« Je te l’ai déjà dit. Ça n’aurait rien fait si tu l’étais… mais tu ne l’étais pas, donc… »
-O-O-