Histoires de Cor; Canicule

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Chapitre 7

Cela faisait maintenant plus qu’une semaine que Mélanie n’eut eue de nouvelles à propos du signalement. Megan lui avait offert de prendre la soirée mais Mélanie pensait que de s’immerger dans le travail l’aiderait à surmonter ses craintes. En fin de compte, ça avait été la bonne décision car l’accusation avait été le sujet de conversation du pub ce soir-là et tous les clients lui avaient signalé leur support et encouragement lors de cette épreuve.

Le soir-même, Mélanie avait téléphoné Karine pour lui dire ce qui était arrivé et pour l’avertir de ce qu’elle l’avait raconté à propos de la naissance de Fiston mais Karine ne semblait pas se faire de soucis au sujet de sa participation aux évènements. Tout comme les clients du pub, elle était beaucoup plus concernée par comment Mélanie se sentait.

Sans que son anxiété s’estompe totalement, la routine de tous les jours fit qu’elle se retira graduellement vers l’arrière de ses pensées. Elle avait l’impression toutefois que Sean, Megan et ses clients agissaient peut-être avec plus de circonspection, avec plus… d’attention… à son égard, si elle aurait osé le dire. Elle ne pouvait que penser que la police continua son investigation et elle essayait de deviner qui, de parmi ses clients, la police aurait interviewé.

Son téléphone sonna… C’était Karine. Depuis que la police était venue, elles avaient commencé à s’appeler mutuellement les après-midis, après que Karine entra de sa shop et avant que Mélanie commence son shift pour voir s’il y avait des nouvelles.

« Salut, Karine. Comment va la vie amoureuse ? »

« Pas de nouvelles encore, non pas que je me plains. Si j’oserai le dire, je dirai que Roger est encore plus intentionné qu’avant et le sexe est encore plus intense, d’une certaine façon, maintenant que nous avons un but. J’ai hâte, par contre, que cette vague de chaleur ait finie ou encore s’il y aurait une brize de temps en temps – c’est une véritable fournaise icitte. Ça donne presqu’envie de s’abstenir… remarque ; j’ai bien dit ‘presque’. T’es chanceuse, là où tu habites ; on y est bien. »

« Hier soir, » continua-t-elle, « après le souper, nous avons eu la visite d’un détective de la Sureté. Il nous a posé un tas de questions à Roger et moi à propos de toi. Moi je lui ai surtout parlé de l’accouchement dans à peu près les mêmes mots que toi. Je crois bien avoir mentionné, par contre, que Butch n’avait jamais rien fait pour subvenir aux besoins de Fiston. Aussi bien qu’il reçoit un peu de monnaie de sa pièce. »

« Le flic voulait savoir le nom de la sage-femme mais je lui ai dit qu’elle était retournée en Amérique Centrale. Je ne tiens pas lui causer d’ennuis. Et Roger s’est souvenu du coup d’avoir rencontré Butch à la brasserie il y a un mois, après que je t’avais appelé la première fois. C’est lui qui l’avait dit que t’habitais Sherwin’s Falls. Ça lui avait sorti de l’esprit par après et il ne me l’avait pas dit. Et toi, encore rien de plus du côté ‘investigation’ ? »
-O-O-
Deux jours plus tard, Françoise Dubeau est revenue visiter l’auberge. Megan était à la réception. Ensemble, elles sont venues rejoindre Mélanie, qui était en train de faire son inventaire, au pub. Quand Mélanie les a vues rentrer, elle figea puis, voyant leurs sourires, elle a tout laissé tomber et courut vers elles.

« Salut, Mélanie. Je pensais que t’aimerais savoir le résultat de nos investigations et comme je te connais et que c’était moi qui t’avais interviewée en premier, j’ai demandé de te l’annoncer personnellement. Nous avons une bonne nouvelle pour toi. »

« Il paraîtrait que ton ex est un petit voyou de petite envergure. Sans que l’on n’a rien pu prouver, nous savons qu’il est impliqué dans plusieurs petites affaires douteuses. Il est, comme disent les journaux, ‘connu de la police’. D’après ce que j’ai su, à même temps qu’il avait déposé cette accusation de kidnapping chez nous, il aurait aussi déposé un signalement de négligence chez la DPJ de Montréal, insinuant que tu travaillais dans une maison close… »

« Quoi ? »

« Il aurait dit à la DPJ que cet auberge est un bordel… En tout cas, nous avons interviewé les voisins ici et le bureau-chef a envoyé des détectives parler à ton amie, ton ancien employeur et celui de ton ex. Nous avons décidé de fermer le dossier. Une suggestion par contre, » dit-elle avec le sourire, « arrange-toi pour au moins avoir un permis de conduire la prochaine fois que ‘t’emprunte’ une voiture. »

Mélanie rougit. « Je ne crois pas que ça risque d’arriver de sitôt. »
-O-O-
Quand l’homme se présenta à la porte de l’auberge et vit Megan lui approcher, nue, il hésita une seconde.

« Je suis bien à l’Auberge de Sherwin’s Falls ? »

« Oui, Monsieur. L’auberge fait partie du centre naturiste à côté ; c’est la politique de la maison que tous, personnel et clients, soient nus en tout temps. Est-ce que je peux vous aider ? »
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L’homme toussa, gêné. « En fait, j’ai besoin de rencontrer une Madame Mélanie Turgeon. Est-elle ici ? »

« Oui, un instant, s’il vous plaît… » Passant par la porte à côté, elle appela « Mélanie, il y a quelqu’un en avant pour toi… »

Quelques instants plus tard, Mélanie passa sa tête par la porte. « Oui ? »

L’homme sortit un document jaunâtre de sa poche intérieure de veston. « Madame Mélanie Turgeon ? Je suis huissier pour la cour. Vous êtes convoquée à vous présenter au tribunal de la jeunesse, rue St. Denis, mardi prochain à dix heures, avec votre fils, Jean Turgeon. Si vous ne vous présentez pas, des poursuites seront entamées contre vous. Les détails sont inscrits dans cette convocation. Bonne journée. » Et il fit demi-tour et sortit presque en courant.
-O-O-
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Chapitre 8

Montréal et les environs sont dans un état perpétuel de construction et de réparation, au point que parfois, des quartiers entiers comme le centre-ville et le Plateau Mont-Royal sont impraticables en voiture. Même l’accès à la ville est problématique car, souvent, les ponts sont également en réfaction. Heureusement, la rue St. Denis entre le boulevard Rosemont et la rue Jean-Talon était relativement indemne donc le seul hic est de trouver du stationnement.

Mélanie avait rendez-vous pour rencontrer le Directeur de la Protection de la Jeunesse en personne. Suite aux abus produits dans le passé autant par des instances religieuses et plus tard par des instances gouvernementales où, par divergence philosophique ou encore suite à un signalement mensonger, des familles entières furent séparées de force et éparpillées dans diverses institutions fermées, le gouvernement avait créé tout un système parallèle au système judiciaire dont le seul but était d’assurer la protection de la jeunesse. Afin de réduire l’image d’une immense structure anonyme, on avait départagé le territoire du Québec en dix-neuf régions, chacun sous l’autorité d’un Directeur distinct. En théorie, les parents gardaient l’autorité finale sur toute décision impliquant leur enfant et pouvaient contester une décision qui ne leur convenait pas. En plus, tout enfant de quatorze ans et plus avait également son mot à dire dans les décisions qui l’affectaient. Cependant, dans beaucoup de cas, malgré cela, ces parents étaient complètement dépassés par la structure bureaucratique et se trouvaient sans défense dans cette organisation.

Sean avait offert de conduire Mélanie à son rendez-vous et de lui prêter main forte. Ils partirent donc à six heures ce mardi-là car il y avait une heure de route pour arriver à l’un des différents ponts qui donnent l’accès à l’île de Montréal-même. Comme Sean l’avait prévu, ils se trouvaient à sept heures à avancer au pas de tortue dans le fil menant vers le pont Champlain, puis à huit heures à avancer à pas de tortue sur l’autoroute Bonaventure. Heureusement, rendu sur l’autoroute Décarie, ils allèrent en contre de la majorité de la circulation et pouvaient accélérer quelque peu. Sean avait préféré allonger le trajet et de faire le circuit pont Champlain, autoroute Bonaventure, autoroute Décarie, et de poursuivre jusqu’à l’autoroute Métropolitain pour sortir à St. Denis car la route la plus directe, Le pont Mercier, Décarie et la rue Jean-Talon, est un interminable chapelet de lumières rouges.
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Ils finirent par trouver une place pour garer la voiture au coin de Bellechasse et Chateaubriand et sont arrivé au bureau du Directeur avec quinze minutes d’avance.

Quelques instants plus tard, ils furent introduits dans le cabinet de Robert Dumoulin, le DPJ de Montréal.

Après les présentations d’usage, le Directeur invita Sean, Mélanie et Fiston à s’installer autour d’une petite table de salon.

« Je tenais à vous rencontrer personnellement parce qu’il y avait plusieurs facteurs plus qu’inusité dans votre dossier et je veux prendre une décision juste qui satisfera tous les personnes impliquées. » Se tournant vers Fiston, il dit « Bonjour Fiston, moi je m’appelle Robert. Aimerais-tu boire quelque chose, du lait, de l’eau, un jus de pomme ? »

« Un jus de pomme, s’il vous plaît, Monsieur. »

« Quel âge as-tu maintenant ? »

« Trois ans, j’aurais quatre ans après Noël. »

« Je sais que ta maman travaille très tard et qu’elle voudrais dormir un peu plus longtemps le matin. Que fais-tu dans ces temps-là ? »

« Je descends à la cuisine et j’aide Ian à faire le déjeuner. Bientôt, il va me montrer comment faire des gaufres mais je le sais déjà. »

« Oh ? Et comment fais-tu des gaufres, toi. Moi, je ne connais pas ça. »

« Tu prends de la pâte à crêpes et avec une cuillère spéciale, tu verses de la pâte à crêpes dans la machine à gaufres puis tu fermes la machine. Quand la lumière s’éteint, tu ouvres la machine, tu mets une assiette en dessous et tu mets la machine en envers pour que la gaufre tombe dans l’assiette. Il faut faire attention parce que la machine est très chaude – tu peux te bruler. »

« Ah. Aimes-tu ça faire le déjeuner ? »

« Oh oui, c’est important que le client à un bon déjeuner pour bien partir la journée. »

« T’as parfaitement raison. » Tournant vers Mélanie, il continua.

« Lors de notre enquête, nous avons découvert que vous aviez déjà été sous la responsabilité des services sociaux ; que vous étiez devenue orpheline en bas âge, que vous viviez avec une prostituée, que vous avez eu votre enfant quand vous aviez à peine dix-sept ans et que vous viviez actuellement dans un endroit qui nous avait été signalé comme étant une maison close. Avec des antécédents comme ça, il est très rare que l’enfant puisse bénéficier des conditions appropriées pour son développement. »

Mélanie interrompt le directeur. « Monsieur, il est vrai que je suis orpheline, que j’ai grandi auprès de ma tante dans un environnement qui, je vous l’accorde, n’était guère adéquat. Au moins, je ne manquais de rien. Avant qu’ils soient morts, j’étais élevé par des parents qui m’aimaient et qui m’ont enseigné le bon sens. Quand mes parents sont morts, on ne m’avait pas donné le choix quand j’ai dû m’installer avec ma tante. Je savais très bien le genre de vie qu’elle menait et dès que le ‘chum’ de ma tante avait commencé à me faire de la pression pour faire partie de son ‘harem’, je me suis sauvé. J’admets volontiers que Butch était une déception mais à l’époque, mes options étaient limitées. »

« Quand je me suis retrouvé à l’auberge, j’ai hésité ; des bars de tous-nus, j’en avais vu assez dans ma vie et je sais ce que la majorité des filles dans ces endroits doivent faire pour survivre. Toutefois, j’ai vite compris que l’auberge, malgré le fait… ou peut-être je devrais plutôt dire ‘à cause du fait’ que tous y sont nus, personnel et clients, est l’endroit le plus respectable et respectueux des gens que j’ai vu jusqu’ici et que je serais heureuse d’y vivre le restant de ma vie. »

Le directeur sourit. « Je le sais, Madame. Nous avions envoyé un de nos meilleurs enquêteurs à Sherwin’s Falls. Cette personne, malgré son apparence quelque peu austère, a à cœur le bonheur des enfants et a un flair pour trouver tout ce qui cloche même dans une ambiance familiale supposément au-delà de tout soupçon. Lors de son enquête, elle aurait parlé à plusieurs de vos voisins et, à l’exception de quelques-uns, tous n’avaient que de bonnes choses à dire sur votre égard. » Mélanie et Sean sourirent à la mention des personnes désapprobateurs. « Cela vous fait rire ? »

« Effectivement. Je peux juste imaginer ce que M. et Mme Bradley avaient à dire à propos de ce qui se passe dans l’auberge, » répondit Mélanie.

Le directeur sourit également. « Oui, bien… pour revenir à notre discussion ; notre enquêteur a longuement parlé avec la femme du pasteur, Mme… euh… Athelstone et avec le curé de la paroisse, le Pr. Poirier, qui lui ont beaucoup appris sur la nudité sociale et la doctrine chrétienne. Quand elle m’est revenue avec son rapport, elle n’avait que des éloges pour l’environnement du jeune. Elle m’a avoué avoir été bouleversée par rapport à ce qu’elle avait cru jusqu’alors par rapport à la nudité et de ce qu’elle eut appris. »

Sean prit alors la parole. « Mme Athelstone m’avait informé de son entrevue avec votre enquêteuse. Elle m’a dit également qu’elle avait expliqué à votre enquêteuse les faits entourant l’inscription de Fiston aux registres gouvernementaux. Vous savez donc que ma femme et moi avons été inscrits comme parrain et marraine. Mélanie n’est pas une femme religieuse et je respecte son choix mais moi, depuis ma naissance en Irlande, la religion catholique a été une partie fondamentale de ma façon de vivre. Je prends mon rôle comme parrain très au sérieux. »

« Afin de vous faciliter votre tâche, j’ai pensé vous faire une copie de mon testament dans lequel j’ai énuméré certains provisions pour Fiston… euh… Jean, en cas de mortalité ou situation d’inaptitude. J’apprécierai que vous en teniez compte lors de votre décision finale. »
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Chapitre 9

Parmi le courrier que le facteur laissa à l’auberge ce matin-là, il y avait une lettre ‘courrier recommandé’ adressée à "Mme Mélanie Turgeon, l’Auberge de Sherwin’s Falls" avec le sigle du Directeur de la Protection de la Jeunesse. Après avoir signé le formulaire de réception, Aelwen courut vers le la salle commune pour lui la porter.
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Dès qu’elle vit la lettre qu’Aelwen avait dans sa main, elle prit le couteau dont elle se servait pour trancher les garnitures des boissons et coupa le rabat de l’enveloppe.

« Madame, » lisait-elle, « c’est avec plaisir que nous vous avisons que le signalement contre vous n’a pas été retenu. Suite à nos investigations, nous avons pu constater que votre fils se trouve dans un milieu propice à son bien-être actuel et futur et nous jugeons qu’il n’y a aucune raison qui justifierait qu’il soit retiré. »

« Ce qui plus est, nous avons pu constater de sources diverses que le signalement d’origine avait été déposé dans le but de vous mettre dans l’embarras et de vous retirer la garde de votre enfant en encontre du bien-être de celui-ci. »

« Étant donné le non-fondé du signalement d’origine, la malfaisance du père de l’enfant dans ce dossier et les antécédents de comportements violents à votre égard, nous avons jugé que le bien-être de votre garçon serait avantagé en vous accordant la garde exclusive. »

« Soyez assuré de nos sentiments les meilleurs et de notre volonté de coopérer avec vous dans les limites de notre rôle. »

<Signé> Espérance LaBonté,
pour le Directeur.

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Chapitre 10

Quand Paul se présenta chez Roger et Karine pour leur annoncer la bonne nouvelle, le vendredi soir la deuxième semaine d’août, ils étaient profondément pris dans une discussion au salon. Karine, depuis sa fin de semaine chez Mélanie, avait pris l’habitude de se déshabiller en arrivant à la maison et de se rhabiller que pour sortir. Au début, elle disait que c’était pour faire face à la canicule mais depuis une semaine déjà, la température avait baissé en bas des 30° et le taux d’humidité se situait plus aux alentours de 50% et elle continua toujours à se promener ainsi. Paul remarqua qu’elle semblait particulièrement radieuse et pétillante malgré la lourdeur apparente de la discussion.

Roger, quant à lui, semblait avoir rajeuni de cinq ans, sinon dix. Paul se dit intérieurement que c’était ridicule de penser ainsi d’un gars qui n’aurait que vingt-trois ans dans trois mois mais c’était ainsi. Depuis le mois de mai, il semblait trainer le poids du monde sur les épaules et ça, encore plus depuis que Karine leur avait parlé de Sherwin’s Falls. Paul ne savait pas ce qui c’était passé entretemps mais ce poids n’était plus là. Lui aussi semblait vouloir se tenir plus droit et, pour une fois, lui aussi était nu.

« Salut, vous deux. Je n’interrompe rien, j’espère ? »

« Non, pas du tout, » répondit Roger. « Karine et moi étions à discuter du futur. Sers-toi une bière, si tu veux et mets-toi à l’aise. Il y a des serviettes dans la lingerie. »

Paul le regarda avec étonnement.

« B’en quoi ? » Puis Roger lui sourit et avec un petit rire gêné, continua. « En fait, Karine était à m’enseigner l’étiquette naturiste… à coup de pied au cul, des fois. »

« Ah bon ? D’accord. Pendant que je suis au frigo, je vous apporte quelque chose ? »

« Un verre d’eau glacée, s’il te plaît, » répondit Karine. « Une bière pour moi, » ajouta Roger.

Quelques instants plus tard, Paul revint avec serviette, verre d’eau et deux bières et, après avoir distribué les boissons, s’installa en face d’eux. « Bon, que passe-t-il ? Vous avez tous les deux l’air du chat qui a bouffé le canari. »

« Premièrement, je veux…/Je suis en…, » Roger et Karine disaient en même temps puis partirent à rire, tous les deux. « Bon, vas-y, Roger. Toi en premier, » conclut Karine.

« D’accord. Bien, pour commencer, je voulais m’excuser auprès de toi, Paul. Depuis quelque temps, j’étais convaincu que toi et Karine, vous vous lanciez en l’air derrière mon dos et j’étais jaloux... »

« Mais j’ai jamais…, » protesta Paul.

« Laisse-moi finir, veux-tu ? C’est difficile, ce que j’ai à te dire. J’avais des idées toutes tordues par rapport à ce qui se passait dans ces centres naturistes et je croyais que vous insistiez tous les deux que je vienne avec vous pour qu’on refasse notre trio du début. J’aime beaucoup Karine mais je me sens incapable de penser à elle en train de le faire avec d’autres gars et encore moins avec plusieurs à la fois. C’est pour ça que je n’ai pas voulu venir. »

« Mais Roger, depuis cette fois-là, je ne l’ai plus jamais fait avec Karine…, » dit Paul.

« Je le sais… maintenant. À votre retour de là-bas, Karine et moi avions eu une longue discussion et nous avons réussi à mettre plusieurs choses au clair. T’es mon meilleur ami, Paul, et je tenais à m’excuser pour t’avoir mal jugé. »

« Voyons donc, penses-y même pas. Il n’y a pas eu de faute dont rien à pardonner. »

« Fiou ! Je suis content que ça, c’est fini. Vas-y, chérie, à toi maintenant, » dit Roger à Karine.

« Bien, comme Roger t’as expliqué, nous avons eu une longue discussion tous les deux quand nous sommes revenus de notre fin de semaine, toi et moi. J’ai fini par le convaincre que, même si toi et moi, nous nous aimons comme amis et tout ça, que c’était lui que je voulais comme père de mon enfant et personne d’autre. Je lui ai parlé du petit de Mélanie, de comment il était ‘bright’ et bien élevé et je lui ai dit que j’étais convaincue que c’était l’environnement dans lequel il se trouvait qui a fait ça. Crois-moi, je m’y connais ; ma mère tenait une garderie clandestine quand j’étais jeune et j’ai changé plus que ma part de couches ! Donc, pour finir ; je n’ai pas été menstruée la semaine dernière et j’ai bonne espoir d’être enceinte. »

À cette nouvelle, Paul a sauté de son fauteuil avec un cri de joie, a plongé vers Karine et, la soulevant du divan, lui fit une accolade qui manqua de lui briser les reins. Puis, lâchant Karine, il sauta sur Roger, qui s’était levé entretemps et lui fit une accolade toute aussi passionnée. Roger, visiblement mal-à-l’aise avec ce contact intime entre leurs deux corps nus, tentait vainement de se débattre.

Quand, finalement, Paul a lâché son étreinte, il ne cessa de dire « Bravo, mon vieux. Félicitations à tous les deux ; une plus merveilleuse chose n’aurait pas pu vous arriver ! Oh, que je suis content ! »

Karine regarda la déconfiture de son homme avec complaisance et amusement ; elle se dit qu’elle aurait du travail à faire pour le sortir de son carcan. Là-dessus plusieurs idées lui vint à l’esprit mais ça, ça serait pour plus tard. Pour le moment, il y avait plus pressant.

« En fait, Paul, » dit-elle, « quand t’es arrivé, nous discutions de ce que nous allions faire. Avec les mises-à-pied à la Packers, la job de Roger est loin d’être certaine. Quant à moi, je pourrais encore peut-être travailler pour six mois à la manufacture… Mais une fois que le bébé est né, je voudrais trouver une job où je pourrais le garder à côté de moi, un peu comme Mélanie a fait à l’auberge. En plus de ça, j’ai le goût de quitter la ville, du moins quitter "La Pointe" – j’ai de plus en plus la conviction que c’est un cul de sac de vivre ici. Je me demandais donc si ça te tenterais de retourner à Sherwin’s Falls cette fin de semaine ? Roger et moi pourrions faire le tour pour voir ce qui est disponible comme job dans le coin et toi, tu pourrais passer du temps avec ta dulcinée… »

Karine avait à peine finit sa phrase quand les deux gars se sont levés d’un bond. « Quoi ! »cria l’un. « Hé ! Juste une minute ! » cria l’autre.

« Assoyez-vous et écoutez-moi ! » dit Karine fermement. « Paul… aimes-tu Mélanie, oui ou non ? »

« B’en… ouais… »

« Assez pour pouvoir envisager de faire ta vie avec elle ? »

« … Euh… Oui » Ça lui gênait de l’admettre.

« Parfait. Ce qui te reste à faire donc, c’est d’en convaincre Mélanie. J’ai comme une idée que ce sera plus facile que tu penses. À toi, maintenant, Roger… dis-moi. Comment te sens-tu ? »

« Énervé, qu’est-ce que tu penses ? »

« Je veux dire… te sens-tu blessé, comme s’il te manque un morceau ou deux ? »

« B’en… non. Pourquoi ? »

« Parce que ça fait deux heures que tu n’as pas un seul morceau de linge sur toi, y inclus les derniers vingt minutes en présence d’un autre homme. T’as même invité cet homme à se déshabiller également. Si ton linge avait véritablement été une composante inséparable de ton corps, t’aurais dû saigner à mort depuis ce temps. Je parie qu’à part de l’instant où Paul t’a fait l’accolade, t’en n’étais même plus conscient. »

« Mais ça c’est différent… Paul est un ami. »

« Non, ça ne fait aucune différence. Demande-le à Paul ; il te le confirmera. La première fois que tu te mets tout nu, tu te sens mal-à-l’aise pour peut-être quinze minutes. Après ça, à moins que quelqu’un te le mets sous le nez, tu n’y penses même plus. Moi, je veux présenter l’homme de ma vie et le père de mon enfant à ma meilleure chum. Tu viens, un point, c’est tout ! »
-O-O-
Deux heures plus tard, Paul stationna sa voiture au même endroit devant l’auberge. Ils seraient arrivés vingt minutes plus tôt mais Karine avait forcé Paul d’arrêter chez un fleuriste et d’acheter un bouquet ; ce serait l’anniversaire de Mélanie dans trois jours. Pendant que Roger sortait les bagages, Karine trainait Paul vers l’intérieur afin qu’il offre le bouquet à Mélanie. Arrivé à la porte de la salle commune, elle le poussa presque jusqu’au comptoir. Mélanie était occupée avec Farley et ne l’avait pas encore remarqué.

« … Euh… Excusez, mademoiselle, sommes-nous trop tard pour louer une chambre, » demanda-t-il.

Mélanie se retourna d’un coup et, le voyant, cria « Paul… » Elle aurait sauté dans ses bras s’il n’y avait pas eu le comptoir entre eux deux.

D’un air gêné, il dit « Tiens, Mélanie. Ceci est pour toi ; bonne fête, » et lui offrit le bouquet.

« Mais comment… c’est Karine qui te l’a dit, n’est-ce pas ? Je vais la tuer ! »

« Non, pas directement, » dit-il sans lui avouer que l’idée du bouquet venait effectivement d’elle. « Quand elle m’avait donné ton numéro de téléphone le mois dernier, elle avait laissé glisser la signification du numéro. J’imagine que t’es une véritable lionne, donc. »

Mélanie partit à rire. « Jusqu’au bout de mes griffes ; Growl ! » et fit le geste de griffer sa proie.

Entretemps, Karine et Roger se sont présentés à la porte du pub, également. Tout comme Karine la dernière fois, Roger était figé sur place, bouche bée. Avec un clin d’œil à Paul, elle indiqua l’expression de Roger et les trois, Mélanie, Paul et Karine, partirent à rire de nouveau.

Tournant vers Farley, elle dit « Will you give me a minute, Farley? I want to sign my friends in for the night. »(‡)

“Sure, love. Take all the time you need. Excuse me for overhearing but is it really your birthday?”

Mélanie acquiesça. “Don’t tell anyone but it’s on Monday. Promise you won’t tell?”

“All right, love, if you insist.”

“You’re a dear.”

De retour au lobby, elle distribua des fiches d’inscription et prit une impression de la carte de Karine. Elle allait prendre les clés des chambres quand Karine lui demanda « Depuis quand parles-tu anglais ? »

« Depuis que mes parents sont morts, j’imagine. Beaucoup des clients de ma tante étaient anglophones. Ça leur gênait de me retrouver encore debout quand ma tante leur ouvrait la porte. Pour briser la glace, plusieurs ont essayé de me faire la conversation. Tête de mule que j’étais, moi, je prétendais ne pas comprendre. Ce n’est que rendue ici que j’ai pu le pratiquer comme il faut, par contre. »

Changeant le sujet, elle indiqua l’escalier. « Je n’ai pas pu vous donner les mêmes chambres que la dernière fois. Cette fois-ci, vous êtes au bout du couloir, face à ma propre chambre. Karine, Roger, votre chambre est celle-ci. Vous avez douche et toilette mais pour le bain, c’est à l’autre bout ; désolée. Paul, la tienne est celle-ci. La salle à diner ouvre à sept heures trente pour le déjeuner. Je vous laisse car je suis seule ce soir ; les filles sont toutes parties en ville pour la graduation de Bess. Elle reçoit son diplôme en gestion d’hôtel ce soir. »

_________________
‡ « Peux-tu me donner une minute, Farley ? J’aimerais inscrire mes amis pour la nuit. »
« Certainement, chère. Prends tout le temps que t’as besoin. Excuse-moi d’avoir écouté mais est-ce vraiment ta fête ? »
Mélanie acquiesça. « Ne le dis pas à personne mais c’est lundi. Tu le promets ? »
« D’accord, chère, si c’est ça ce que tu veux. »
« T’es un amour. »


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Chapitre 11

« Merci de m’avoir emmené au restaurant, Paul. C’était délicieux. Ça fait longtemps que je n’ai pas mangé du chinois et certainement pas du aussi bon. Je ne m’entendais pas du tout à ça – quand je t’avais appelé, ce n’était pour partager la bonne nouvelle avec quelqu’un avec qui que je me sens bien. Ce n’était pas nécessaire de venir en gang me chercher et de me sortir de la sorte – non pas que je ne l’apprécie grandement. »

« Ce n’est rien du tout. J’avais envie de sortir avec toi de toute façon et quand j’ai appelé Karine pour avoir une idée de tes goûts, elle m’a tout de suite dit de passer par chez elle pour recueillir Roger et elle en chemin. Pour le chinois, cela me surprend. T’es pourtant une fille de la ville. Tu devrais connaître ça, quand même ? »

« Butch était plutôt style ‘Pâté chinois’ que ‘Buffet chinois’. Ça m’arrivait de m’en commander quand j’étais vraiment trop fatiguée ou trop écœurée pour cuisiner mais à chaque fois, Mossieu sortit en claquant la porte pour aller manger à la brasserie. De toute façon, les restos près d’où nous habitions n’étaient pas connus pour leur salubrité, ni pour la qualité de leur buffet, » dit-elle avec une pointe d’amertume.

« Que veux-tu faire maintenant, » lui demanda Paul.

« Quelle heure est-il ? Est-ce que nous sommes obligés à rentrer tout de suite ? J’ai le goût de marcher le long de la berge, juste de profiter de la soirée et de regarder la réflexion des lumières dans l’eau. »

« Là, il est neuf heures trente… mais nous ne sommes pas attendus nulle part. La nuit est à vous, Madame ; vos désirs font loi. »

Mélanie prit le bras de Paul et appuya sa tête contre son épaule tandis qu’ils marchèrent lentement le long de la rue Victoria vers le parc et le havre de Valleyfield. Arrivés à la rue Nicholson, ils prirent le pont, traversèrent le stationnement et s’installèrent sur un banc face à la fontaine.

Se collant la tête de nouveau sur l’épaule de Paul, elle dit avec une pointe d’humour, « Conte-moi ta vie… »
-O-O-
Le ciel commença à pâlir et Mélanie sommeillait doucement sur son bras quand Paul s’est secoué et remua l’épaule qui s’était engourdi.

« Viens, Mel ; je pense qu’on est mieux de rentrer… »

« M’mm… D’accord, » répondit Mélanie avec une voix à moitié étouffée par le sommeil. Paul se leva, aida Mélanie à se lever puis, la supportant à moitié, ils se retournèrent vers l’auto, un kilomètre plus loin.
-O-O-
Karine, comme une véritable mère-poule, n’avait dormi qu’avec un œil pendant la nuit donc, quand elle entendit une porte de voiture se fermer à cinq heures trente, elle avait une bonne idée de qui il s’agissait. Elle se leva doucement pour ne pas réveiller Roger et sortit dans le couloir. Comme de raison, quelques instants plus tard, Paul et Mélanie montèrent à l’étage. À la vue de Karine qui les attendit, Paul lui fit un petit sourire gêné et guida Mélanie vers la porte de sa chambre.
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Quand Mélanie fit mine de vouloir ouvrir sa porte, Karine intervint. « Holà ! Que c’est que tu penses faire là, toi ? »

« B’en… aller me coucher, niaiseuse. Qu’est que toi, tu penses ? »

« Pas question ! Tu vas réveiller Fiston ! C’est déjà tout arrangé… ce matin, après le déjeuner, Roger et moi, nous l’emmenons à l’aqua-parc. Toi, t’as congé pour la journée. Allez, demi-tour et vas te coucher avec Paul. Ouste, au lit !… Et, au cas que l’idée t’effleure l’esprit plus tard, je t’ai laissé quelques capotes sur la table de nuit. »

Quand elle vit Mélanie rougir malgré la noirceur relative du couloir, elle sourit, contente d’avoir vu juste et à Paul, avec un clin d’œil, elle dit « Prends en soin, Paul ; elle le mérite. »

« Ça, je le sais, Karine… et… merci. »

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Cor
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Re: Histoires de Cor; Canicule

Message par Cor »

Salut

Pour le moment, l'hébergeur que j'utilise pour entreposer les illustrations de mes histoires ne semble pas être accessible donc je dois attendre pour afficher le dernier chapitre de mon histoire.

Entretemps, j'ai préparé un document pour vous...

Je vous avais demandé des suggestions pour d'autres histoires calquées dans cet «univers» de Sherwin's Falls. Roger, dans un commentaire fait lors de l'histoire 'Vatican 2 1/2', dit qu'il aimerait un résumé des différents personnages. Afin de vous aider, je vous ai préparé un... gabarit est peut-être le meilleur mot, pour préparer l'histoire. Avec ça, je vous ai préparé des fiches de quelques personnages-clés, ainsi qu'une liste de tous les personnages des différentes histoires.

Vous trouverez ce document < ici >

Roger dit également ne pas connaître le coin. Voici un lien vers la page Google Maps de l'endroit où le village fictif de Sherwin's Falls est situé - https://www.google.ca/maps/place/Frankl ... authuser=0
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Cor
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Re: Histoires de Cor; Canicule

Message par Cor »

Chapitre 12

Comme d’habitude, Mélanie se réveilla dès qu’elle entendit Fiston s’agiter dans son lit. En jetant un coup d’œil par la fenêtre, elle vit que le soleil brillait ; la chute serait jolie avec son arc-en-ciel matinal.

À côté d’elle, elle entendit Paul qui parlait doucement « Bonjour, Fiston. Que dirais-tu si nous allions faire une saucette au lac au lieu de prendre une douche ce matin ? Comme ça, ta maman pourrait se reposer encore un peu. »

Fiston réfléchit sérieusement à la question… « OK. »

Sortant deux serviettes de la commode, il sortit avec Fiston, fermant la porte doucement derrière lui.

Vingt minutes plus tard, se sentant vaguement coupable de paresser ainsi, elle se leva à son tour et ouvra la commode pour prendre, elle aussi, une serviette (Merde, elle n’avait pas le choix ; elle devra absolument faire le ménage aujourd’hui, le tiroir était vide. Au moins, elle n’était pas obligée de laver elle-même ses draps et ses serviettes.) De toute façon, elle aurait des décisions à prendre sous peu ; sa chambre à l’auberge était déjà à l’étroit avec un lit simple et le petit lit de Fiston. Maintenant que Paul partageait son lit plus ou moins en permanence et partait vers la ville pour travailler vers les cinq heures trente tous les matins, il y avait plus d’espace dans une boite à sardines. Tant que lui et elle se couchèrent en cuillère et ne bougeaient pas trop de la nuit, ça allait encore mais côté intimité, ça laissait beaucoup à désirer.

Rendue au lac, elle voyait que Paul nageait à l’autre extrémité. Prenant son courage à deux mains, elle marcha jusqu’à la hauteur des genoux et plongea la tête en premier. Le lac, alimenté par une source en amont de la chute, était toujours frisquet, même au plus chaud de l’année. Fiston, lui, semblait être insensible à la température de l’eau. Il était carrément assis dans l’eau sur le bord et s’amusait à faire couler de l’eau de ses mains pour regarder l’effet du soleil dans les gouttelettes.

Frissonnant, elle sortit en courant et se dépêcha à s’essuyer. Paul, ayant fini son tour du lac à la nage, s’approcha de la plage et sortit de l’eau.

« Bonjour, » dit-il, lui faisant la conversation comme s’il la voyait pour la première fois. « Viens-tu au lac tous les matins ? »

« Ah, non ; je suis beaucoup trop frileuse, » dit-elle en riant. « D’habitude, c’est une bonne douche chaude. C’est le soleil qui m’a incité à descendre ce matin. Fiston aime ça, par contre – je ne sais pas comment il fait. Excuse-moi mais il n’y avait plus de serviettes ; je t’ai volé la tienne. »

« Ce n’est pas grave ; je me débrouillerai. Moi, j’adore le lac à cette température ; ça ouvre l’appétit. Quand j’étais à San Francisco, j’allais parfois à Black’s Beach ; c’est une plage libre près du Golden Gate. La baie de San Francisco est réputée d’être glaciale ; au point que les gardiens d’Alcatraz jugeaient qu’il n’était pas vraiment nécessaire de surveiller les murs car tout prisonnier qui voulait s’échapper à la nage était mort-gelé avant d’arriver à la berge. »

« Parlant d’appétit, allons voir si la salle à diner est ouvert ; j’ai un faim de loup ! Viens, Fiston, c’est le temps de manger. »

« OK »

Et tous les trois rentrèrent, main dans la main.
-O-O-
Sean était au téléphone avec la boucherie à Covey Hill qui lui fournissait en viande pour l’auberge.
Image
“May I speak to Brian Donlevy, please…? Hey, Brian, you wanker… Sean O’Shaughnessy here. How’re they hangin’?”‡

“…”

“Not bad, not bad at all. That last batch of sausages you sent us was terrific; I sold out in two days. What did you do to them… no, on second thought, don’t tell me, I don’t want to know.”

“…”

“Certainly. As a matter of fact, double the order… Great!”

“…”

“Actually, I need a favour. A couple of guests came to see me; they’re friends of Mélanie’s. They’re both graduates of the butchery programme of St. Pius X in Montreal. They’re working for that fly-by-night operation, Liberty Packers and Liberty is pulling that payroll shuffle again. I was wondering if you knew of an operation that is hiring… Yeah, they’d like to settle in the neighbourhood. One of the lads is Mélanie’s boyfriend… Yeah, she’s finally landed someone to her liking… a good lad. A good thing too, after what that asshole tried to pull on her. Where was I? Oh, yeah… and the other has got a girlfriend who’s pregnant – I’m thinking of hiring her to run the reception desk at the Centre, as a matter of fact. Little Bill has got too much on his hands and could use the help.”

“…”

“Sure, I could send them over… Today? Great! Thanks, mate; I owe you. Ta…”
-O-O-
Quand les gars revinrent de leur excursion, les filles étaient toutes les deux au bar ; Mélanie côté service et Karine côté client. Karine prenait sa grossesse au sérieux et avait déjà mis une croix sur toute boisson qui pourrait nuire au développement du fœtus. Elle était à siroter un verre d’eau gazéifiée avec une tranche de citron.

« Tiens, vous voilà, enfin ! On pensait appeler la Sureté pour déclarer votre disparition. Où êtes-vous allés ? On commençait à être inquiet. »

Roger regarda Paul « On le dis-tu ? »

« Nan… laissons-les languir un peu. Elles le méritent bien pour tous leurs mauvais tours… »

Karine, qui avait son verre à la bouche, cracha partout. « Quoi ! Quels mauvais tours ? »

« B’en, entre autres, inciter ton pauvre chum virginal à fréquenter ce lieu de débauche…, » répondit Paul.

Cette fois-ci, c’était à Mélanie de se pomper mais avant qu’elle puisse dire quoi que ce soit, Megan, qui avait suivi les gars en catimini, commença à rire aux éclats. « Du calme, les filles… vous ne voyez pas qu’ils sont à jouer avec vous comme un pêcheur à la mouche joue une truite ? » Puis, tournant vers les gars, elle demanda « Pis, bonnes nouvelles ? »

Roger fit un grand sourire. « Ouais ! »

« Merveilleux. Je suis vraiment contente. » Sans dire plus, elle s’est retourné et partit aussi doucement qu’elle est arrivée.
FIN
________________
‡ « Puis-je parler à Brian Donlevy, s’il vous plaît… Salut, Brian, espèce de vieux branleux… Sean O’Shaughnessy, ça gaze ? »
« … »
« Pas pire, pas pire du tout. Ce dernier lot de saucisses que tu nous as envoyé était fantastique ; je les ai toutes vendues dans deux jours. Que leur as-tu fait ? Non, en y repensant, ne me le dis pas ; je ne veux pas le savoir. »
« … »
« Certainement, En fait, double ma commande… Parfait ! »
« … »
« Pour tout te dire, j’aimerais que tu me fasses une faveur. J’ai deux clients ; ce sont des amis de Mélanie. Ils ont tous deux gradué de l’École de boucherie de St. Pius X à Montréal. Ils travaillent pour cette bande de crosseurs, Liberty Packers et Liberty est à nouveau à jouer avec les slips de paie. Je me demandais si tu connaissais quelqu’un qui embauchait… Ouais, ils aimeraient s’installer dans le coin ; un des gars est le chum à Mélanie… Ouais, elle a fini par en pogner un à son goût… un gars fort sympathique. Une bonne chose, après ce que l’autre trou de cul avait essayé de lui faire. Bon, où en était-je ? Ah, oui… et l’autre a une blonde qui est enceinte – je pensais embaucher la fille pour l’accueil au Centre, d’ailleurs. Le Petit Bill en a trop sur les mains et aurait besoin d’un coup de main. »
« … »
« Bien sûr, je pourrais te les envoyer… Aujourd’hui-même ? Fantastique ! Merci, l’ami, je t’en dois une. À plus. »
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roger
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Re: Histoires de Cor; Canicule

Message par roger »

J’ai bien aimé cette histoire. Je connais pas mal les personnages pour avoir vécu entre 1989 et 2005 à Verdun. Je ne sais pas si j’aurais pu l’écrire. Selon moi, je les aurais peut-être imaginés plus marqués que cela. Lorsqu’on est entouré par des conditions de vie difficiles (drogue, prostitution, bien-être social, petits larcins, dettes), il est plutôt difficile de paraître positifs, gentils, etc. Mais d’un autre côté, il existe des organismes communautaires (la coopérative médicale, la coopérative d’épicerie, les loisirs familiaux) qui peuvent avoir une bonne influence sur eux. Je me souviens d’un ami qui était membre d’un parti socialiste et qui travaillait beaucoup avec ces personnes. D’ailleurs j’ai trouvé que Paul me faisait penser à lui. Voilà.
Maintenant je me demande si je serais capable d’imaginer une histoire à partir des éléments déjà écrits. En ce qui concerne le lieu, la Pommerie pourrait me servir d’exemples. C’est un peu le même style. Par contre le fait que le village accepte à la quasi-unanimité le naturisme me dérange un peu. J’aurais bien voulu avoir des opposants. À un moment donné j’ai cru que Butch allait jouer ce rôle, qu’il allait ameuter la population (dans tous les villages, il y a des méchants), faire du trouble. J’avais pensé comme chute de l’histoire (le final) que Paul le gentil garçon lui donnerait un bon coup de poing dans le nez. Finalement cela aurait été comme «une guerre des boutons» entre adultes : les naturistes contre les textiles. Mais l’histoire ne s’est pas terminée de cette façon.
Mais ne désespérons pas. Je vais essayer de trouver quelque chose. Mais sois patient, mon cher Cor. Je suis quelqu’un de très occupé.
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Re: Histoires de Cor; Canicule

Message par Cor »

Merci, Roger, j'apprécie...

Vous n'êtes pas le premier à me dire que je devrais inclure plus de conflit dans mes histoires ; d'ailleurs c'est pour ça que j'ai inventé les Bradley. C'est peut-être parce que je n'ai jamais quitté mon cœur d'enfant mais, avec moi, les méchants sont invariablement des figures comiques et ridicules dans le genre des méchants des dessins animés.

Entretemps, chers lecteurs, qu'aimeriez-vous lire maintenant ? J'ai à vous proposer un roman (sans blague - il contient presque cent milles mots !) situé dans les îles du Caraïbes, appelé «San Francesco».

j'ai deux séries d'histoires plus courtes que j'ai traduit d'un auteur de Toronto, l'une tourne autour des concours de nage entre écoles secondaires, l'autre est située dans une petite ville fictive aux abords du Golfe du Mexique appelé Manatee Bay. Parmi ces histoires, j'en ai inséré plusieurs de ma propre plume, dont deux avec une enseignante comme personnage principal.

J'ai aussi toute une série d'histoires écrites par un auteur anglais qui raconte la vie de plusieurs ados naturistes qui habitent la région de Manchester en Angleterre. Ces histoires, quoique semi-indépendantes, se déroulent dans un ordre chronologique et suivent ces jeunes jusqu'à l'âge adulte.

Finalement, j'ai aussi une paire d'histoires qui tournent autour une ado du nom de Kirsten que voulait à tout prix devenir 'maître-nageur', un sauveteur du genre que l'on voyait jadis à l'émission 'Baywatch' et qui finit par travailler à une plage naturiste. Je n'ai fait que traduire la première mais comme l'auteur d'origine n'avait jamais terminé la deuxième, c'est moi qui l'ait terminée.

Laissez-moi savoir votre choix soit par message privé, soit par réponse ici. Je vous donne une semaine... En attendant, je vais vous afficher une petite histoire calquée sur le personnage de Miley Cyrus à l'époque qu'elle faisait l'émission de Disney, «Hannah Montana».
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bobettebob
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Re: Histoires de Cor; Canicule

Message par bobettebob »

J'ai eu un peu de retard, mais j'ai finalement complété la lecture de cette histoire en 3½ parties. :)

J'ai bien aimé le fait que le lecteur n'est pas constamment rappelé inutilement qu'un personnage soit nu, sauf lorsque nécessaire pour comprendre l'histoire. Au lieu de s'attarder aux petits problèmes de chacun des résidents naturistes comme le font plusieurs histoires naturistes, plusieurs segments se détachent géographiquement pour se rejoindre un peu plus tard. Des faits historiques, des références culturelles, quelques dialogues en bon québécois, bref, on s'attache facilement aux lieux et aux personnages principaux.

Bravo Cor. On en demande encore plus !
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